Parfois, dans la vie, vous rencontrez quelqu’un que vous ne pourrez jamais oublier. Je ne pense pas qu’il y ait beaucoup d’amis sur lesquels on puisse compter dans les situations les plus difficiles. Un ami dont les kilomètres de distance géographique et les années passées ne nuisent pas à son amour et à sa pureté amicale, et chaque fois que vous le voyez, vous ressentez la même chaleur et l’honnêteté des premiers jours. Pouran Najafi était de ces amies pour moi. Une amitié avec la clarté de l’eau de source de notre région du nord. Pouran Najafi est morte le 9 février 2013, fauchée par une pluie de roquettes commandées par le régime iranien sur la prison de Liberty, en Irak.
J’ai fréquenté Pouran Najafi lors de nombreux meetings et cérémonies de l’Organisation des Moudjahidine du peuple d’Iran (OMPI) à Racht au lendemain de la révolution contre le chah. Mais c’est dans l’une des cellules de la prison de Racht que j’ai pu la connaître vraiment et en faire pour toujours l’une de mes meilleures amies. Pouran étudiait à l’École de Technologie, l’un des rares lycées mixtes à l’époque. Elle connaissait très bien mon frère Ahmad avec lequel elle partageait la plupart des activités de l’École de Technologie. Elle m’a raconté de beaux souvenirs de mon frère cadet, des choses que je ne savais pas de lui. Elle m’a confié avec un sourire qu’elle avait dit à Ahmad en public qu’elle était sa sœur. Elle m’a ensuite expliqué les événements de cette journée d’avril 1980 où la milice du Bassidj a enlevé 13 lycéens, dont Ahmad, pour les torturer à la mosquée de Bagher-Abad. Quelques jours plus tard, Ahmad et d’autres lycéens s’étaient rendus au bureau du directeur de l’École de Technologie pour dén
oncer la torture et le silence complice du directeur.
L’un des enseignants avait demandé à Ahmad de lui montrer les traces de torture. Pouran ayant dit que tous étaient des hommes sauf elle, avaient été brutalisés. Elle a ajouté : « J’ai senti qu’Ahmad était gêné d’être torse nu devant moi. Je lui ai dit d’une voix forte : Ahmad, je suis comme ta sœur. Montre les traces de torture… »
Ahmad a soulevé sa chemise. Tout son corps était labouré d’hématomes et de coupures causées par une lame de cutter. Les larmes ont jailli dans les yeux de tous quand ils ont vu cette scène qui les a profondément touchés et la brutalité contre ce jeune partisan de l’OMPI.
Pouran était simple, sincère et honnête. Elle avait son franc-parler tout en restant humble. Devant les gardiens de la révolution, Pouran était courageuse et intrépide. Très dégourdie et précise, elle trouvait toujours des solutions dans les moments difficiles.
C’est pourquoi, dans notre plan d’évasion de la prison du club des officiers (Afsaran) à Racht, Pouran était chargé de divertir les gardiennes. Elle a joué un rôle clé dans mon évasion, et si je suis libre aujourd’hui, c’est grâce à son sacrifice. Un rôle sans lequel l’opération audacieuse et collective des prisonniers politiques Moudjahidines du peuple n’aurait pas été possible. Un rôle pour lequel elle a payé un lourd tribut lors des interrogatoires, la torture et la déportation vers diverses prisons. Pouran a raconté une petite partie de ces souffrances dans un livre intitulé « Héros et héroïnes ».
Elle a écrit à propos de cette opération d’évasion: « Nos circonstances s’aggravaient, mais nous commencions à mieux maîtriser la situation et nous étions déterminées à résister. Depuis longtemps nous voulions porter un coup dur en nous évadant et envoyer un message au régime par l’innovation et la bravoure de notre plan : vous vous trompez si vous pensez pouvoir briser notre moral ou forcer un partisan de l’OMPI à capituler. Nous croyions fermement en ce que Massoud Radjavi avait dit : Le soleil reste le soleil, même en captivité. »
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire