lundi 29 avril 2024

Beauvais. Le combat d’une autrice iranienne pour un renversement politique en Iran

 Oisehebdo  23 AVRIL 2024  Par Laurence Erikson

Le combat d'une femme pour que la démocratie et la liberté l'emportent en Iran sur le régime dictatorial actuel.



Sa devise : « Femmes, Résistance, Liberté ». Massoumeh Raouf fera partie des auteurs et autrices présents au 6e salon du livre de Beauvais le 27 avril prochain sur la Place Jeanne Hachette pour présenter ses deux ouvrages : « Un petit prince au pays des mollahs » et «Évasion de la prison d’Iran ».

Réfugiée politique en France

Réfugiée politique en France depuis 30 ans, l’écrivaine de 63 ans écume les salons pour plaider en la faveur d’un renversement politique en Iran« J’ai passé plus de temps de ma vie en exil que dans mon propre pays » confie-t-elle avec une pointe d’ironie. Très jeune, avec sa mère et son frère cadet, l’Iranienne a vécu son enfance sous le régime du shah contre lequel elle protestait déjà. Très vite, elle s’est impliquée dans le mouvement de résistance des Moudjahidines du peuple d’Iran pour lequel elle a milité et collaboré en tant que journaliste, pour lutter contre le régime dictatorial des mollahs, pendant Khomeini et après, encore en place en Iran. « Ceux qui osent le défier sont qualifiés d’ennemis de Dieu ».

Condamnée à 20 ans de prison en 10 minutes

Un engagement qui lui a valu un séjour expéditif en prison où elle a subi des tortures. Elle avait 20 ans. « J’ai été arrêtée en septembre 1981 dans la rue. En 10 minutes, j’ai été condamnée à 20 ans de prison.» Au bout de 8 mois, avec ses codétenues, « des filles très courageuses », elles fomentent une évasion« Je ne pensais pas m’en sortir vivante. » Si Massoumeh a réussi à s’échapper, ses malheureuses compagnes de cellule pour lesquelles l’opération a échoué ont été torturées, la plupart ont été exécutées dans le massacre de 1988, comme son frère. Elle leur rend hommage dans l’un de ses deux ouvrages qu’elle présentera au salon du livre : « Évasion de la prison d’Iran. » édité en 2022, écrit en 2021. Après son évasion, le régime a fait pression sur sa famille pour qu’elle se rende. «Ils ont arrêté ma mère atteinte d’un cancer. Elle est morte peu après sa libération, faute de soins. Avant de mourir, elle m’a dit de continuer le combat. C’est la dernière fois que j’ai entendu sa voix.»

Climat de terreurs et tortures

Avant de réussir à sortir d’Iran, elle erre clandestinement, accueillie par des familles du réseau de résistance malgré les risques d’exécution encourus. «Je suis arrivée en France avec pour seules affaires les vêtements que je portais ».
De France, elle continue son combat en attendant que son frère cadet, Ahmad, âgé de 16 ans à l’époque de son arrestation la rejoigne. Elle apprend par son père en Iran, décédé depuis, que son frère arrêté avant sa fuite, a été accusé de complicité dans son évasion, de nouveau interrogé et torturé avant d’être exécuté en 1988. Comme 30000 autres prisonniers politiques dont 90% de membres des Moudjahidines Iraniens, Ahmad a été jeté dans une fausse commune. Une fatwa commanditée par Khomeini.
Des histoires qu’elle rappelle avec des trémolos dans la voix qui en disent long sur l’émotion qui transpire encore, même 30 ans après.

Une BD pour éveiller les esprits

Son frère est le héros de cet autre ouvrage qu’elle présentera au salon du livre, sous forme cette fois de bande-dessinée : « Un petit prince au pays des mollahs », sorti en 2018.
Une manière originale, pédagogique, en décalage avec la gravité des faits dénoncés par le ton 
« joyeux des espoirs de liberté »
 qui y sont racontés, d’attirer l’attention et d’éveiller les esprits, même des plus jeunes, sur le climat de terreur encore d’actualité subi par les Iraniens.

Un régime misogyne

Massoumeh est optimiste : «Les mentalités changent. Même des sympathisants du régime estiment qu’un renversement en faveur de la liberté du peuple est la seule solution. 80% des Iraniens sont contre le régime en place selon des études menées après le soulèvement de septembre 2022». Une « barbarie » au nom de la religion qu’elle dénonce fermement : «Dieu ne soutient pas la sauvagerie. Ce ne sont pas des Islamistes, mais des intégristes, des terroristes, au même titre que les Djihadistes. » assène-t-elle. La justice qu’elle réclame pour les 120 000 « héros de la liberté » sacrifiés, ne saurait tarder par un renversement imminent, « mené par des femmes, les forces de ce changement », contre un régime misogyne, antidémocratique, inégalitaire

Appel au soutien international

Le soulèvement de 2022 mené par la nouvelle génération de la Résistance composé de 50% de femmes a eu un écho mondial, grâce notamment au développement des moyens de communication permettant désormais de filmer en direct les scènes, ce qui n’existaient pas aux racines du mouvement il y a 44 ans.
Malheureusement, ce leadership féminin aurait fait hésiter les pays occidentaux à se désolidariser du régime en place. Une 
« complaisance  désastreuse pour le peuple iranien et la région du Moyen-Orient qu’il faut stopper, en coupant toute relation avec ce régime, en fermant leur ambassade en Iran… » dit-elle.
Membre du CNRI (Conseil National de la Résistance Iranienne, dirigé par Myriam Radjavi), Massoumeh attend que ce régime des mollahs soit reconnu de 
« Crime contre l’humanité » pour «ses exécutions politiques massives, même d’adolescents ».

Crime contre l’humanité

Selon Massoumeh, l’espoir d’une prise de conscience internationale naît à la lecture du rapport d’Amnesty international de 200 pages pour reconnaître les faits criminels dénoncés.
Lors du colloque 30 janvier dernier du Comité Parlementaire pour un Iran Démocratique (CPID) présidé par la députée du Val d’Oise Cécile Rilhac, un paragraphe est consacré en page 8 à l’urgence de 
« soutenir le mouvement de résistance en Iran pour la paix afin d’assurer la sécurité dans le monde » : « L’embrasement du Proche-Orient représente une menace sérieuse pour la paix au Moyen-Orient et la sécurité en Europe. Le régime iranien, en soutenant activement l’attaque du 7 octobre, les attaques contre le transport maritime et le libre-échange régional, ainsi qu’en fournissant un soutien financier et militaire aux groupes affiliés, demeure la principale source de guerre et d’instabilité dans la région ; comme alerté à plusieurs reprises par la France. »

Avec ou sans voile, même combat

Et c’est en portant le foulard, un choix religieux pleinement assumé « qui n’est pas une obligation religieuse, contrairement à ce que les intégristes veulent faire croire », que la militante continue son combat aux côtés de ces « courageuses » iraniennes (portant le voile ou pas) de la Résistance, en scandant ce même slogan qu’au premier jour du soulèvement pour la liberté, la justice et la démocratie : « Avec ou sans hijab, en avant la révolution pour en finir avec ce régime.” Son seul espoir de regagner sa terre natale…

https://www.oisehebdo.fr/2024/04/23/beauvais-combat-autrice-iranienne-renversement-politique-iran/



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