Oisehebdo 23 AVRIL 2024 Par Laurence Erikson
Le combat d'une femme
pour que la démocratie et la liberté l'emportent en Iran sur le régime
dictatorial actuel.
Sa devise :
« Femmes, Résistance, Liberté ». Massoumeh Raouf fera partie des
auteurs et autrices présents au 6e salon
du livre de Beauvais le 27 avril prochain sur la Place Jeanne Hachette pour
présenter ses deux ouvrages : « Un
petit prince au pays des mollahs » et «Évasion de la prison d’Iran ».
Réfugiée politique en France
Réfugiée politique en
France depuis 30
ans, l’écrivaine de
63 ans écume les salons pour plaider en la faveur d’un renversement politique en Iran. « J’ai passé plus de temps de ma vie en exil que dans mon propre pays » confie-t-elle avec une pointe d’ironie. Très jeune,
avec sa mère et son frère cadet, l’Iranienne a
vécu son enfance sous le régime du shah contre
lequel elle protestait déjà. Très vite, elle s’est impliquée dans le mouvement de résistance des
Moudjahidines du peuple d’Iran pour lequel elle a milité
et collaboré en tant que journaliste,
pour lutter contre le régime
dictatorial des mollahs, pendant Khomeini et après, encore
en place en Iran. « Ceux qui osent le
défier sont qualifiés d’ennemis de Dieu ».
Condamnée à 20 ans de prison en 10 minutes
Un engagement qui lui a
valu un séjour expéditif en prison où elle a subi des tortures. Elle avait 20 ans. « J’ai été arrêtée en septembre 1981 dans la rue. En
10 minutes, j’ai été condamnée à 20 ans de prison.» Au bout de 8 mois, avec ses codétenues, « des filles très courageuses », elles fomentent une évasion. « Je ne pensais pas m’en sortir vivante. » Si Massoumeh a réussi à s’échapper, ses
malheureuses compagnes de cellule pour lesquelles l’opération a échoué ont été
torturées, la plupart ont été exécutées
dans le massacre de 1988, comme son frère. Elle leur rend
hommage dans l’un de ses deux ouvrages qu’elle présentera au salon du
livre : « Évasion de la
prison d’Iran. » édité en 2022,
écrit en 2021. Après son évasion, le régime a fait pression sur sa famille pour
qu’elle se rende. «Ils ont arrêté ma mère
atteinte d’un cancer. Elle est morte peu après sa libération, faute de soins.
Avant de mourir, elle m’a dit de continuer le combat. C’est la dernière fois
que j’ai entendu sa voix.»
Climat de terreurs et tortures
Avant de réussir à sortir d’Iran, elle
erre clandestinement, accueillie par des familles du réseau de résistance
malgré les risques d’exécution encourus. «Je suis arrivée en France avec pour seules affaires les
vêtements que je portais ».
De France, elle continue son combat en attendant que son frère cadet, Ahmad,
âgé de 16 ans à l’époque de son arrestation la rejoigne. Elle apprend par son
père en Iran, décédé depuis, que son frère arrêté avant sa fuite, a été accusé
de complicité dans
son évasion, de nouveau interrogé et torturé avant d’être exécuté en 1988. Comme
30000 autres prisonniers
politiques dont 90% de membres des Moudjahidines Iraniens,
Ahmad a été jeté dans une fausse commune. Une fatwa commanditée par Khomeini.
Des histoires qu’elle rappelle avec des trémolos dans la voix qui en disent
long sur l’émotion qui transpire encore, même 30 ans après.
Une BD pour éveiller les esprits
Son frère est le héros
de cet autre ouvrage qu’elle présentera au salon du livre, sous forme cette
fois de bande-dessinée : « Un
petit prince au pays des mollahs », sorti en 2018.
Une manière originale, pédagogique, en décalage avec la gravité des faits
dénoncés par le ton « joyeux des
espoirs de liberté » qui y sont
racontés, d’attirer l’attention et d’éveiller les esprits, même des plus
jeunes, sur le climat de terreur encore
d’actualité subi par les Iraniens.
Un régime misogyne
Massoumeh est
optimiste : «Les mentalités
changent. Même des sympathisants du régime estiment qu’un renversement en
faveur de la liberté du peuple est la seule solution. 80% des Iraniens sont
contre le régime en place selon des études menées après le soulèvement de
septembre 2022». Une « barbarie » au nom de la religion qu’elle dénonce fermement : «Dieu ne soutient pas la sauvagerie. Ce ne sont pas des
Islamistes, mais des intégristes, des terroristes, au même titre que les
Djihadistes. » assène-t-elle. La
justice qu’elle réclame pour les 120 000 « héros de la liberté » sacrifiés, ne saurait tarder par un
renversement imminent, « mené par des
femmes, les forces de ce changement », contre un régime
misogyne, antidémocratique, inégalitaire…
Appel au soutien international
Le soulèvement de 2022 mené
par la nouvelle
génération de la Résistance composé de 50% de femmes a eu
un écho mondial, grâce notamment au développement des moyens de communication
permettant désormais de filmer en direct les scènes, ce qui n’existaient pas
aux racines du mouvement il y a 44 ans.
Malheureusement, ce leadership féminin aurait fait hésiter les pays occidentaux
à se désolidariser du régime en place. Une « complaisance désastreuse pour le peuple
iranien et la région du Moyen-Orient qu’il faut stopper, en coupant toute
relation avec ce régime, en fermant leur ambassade en Iran… » dit-elle.
Membre du CNRI (Conseil National de la Résistance Iranienne, dirigé par Myriam
Radjavi), Massoumeh attend que ce régime des mollahs soit reconnu de « Crime contre l’humanité » pour «ses
exécutions politiques massives, même d’adolescents ».
Crime contre l’humanité
Selon Massoumeh,
l’espoir d’une prise de conscience internationale naît à la lecture du rapport
d’Amnesty international de
200 pages pour reconnaître les faits criminels dénoncés.
Lors du colloque 30 janvier dernier du Comité Parlementaire pour un Iran Démocratique (CPID) présidé
par la députée du
Val d’Oise Cécile Rilhac, un paragraphe est consacré en page 8
à l’urgence de « soutenir le
mouvement de résistance en Iran pour la paix afin d’assurer la sécurité dans le
monde » : « L’embrasement du Proche-Orient représente une menace
sérieuse pour la paix au Moyen-Orient et la sécurité en Europe. Le régime iranien, en soutenant activement l’attaque du 7 octobre, les attaques contre le transport maritime et le
libre-échange régional, ainsi qu’en fournissant un soutien financier et
militaire aux groupes affiliés, demeure la principale source de guerre et
d’instabilité dans la région ; comme alerté à plusieurs reprises par la
France. »
Avec ou sans voile, même combat
Et c’est en portant le
foulard, un choix religieux pleinement assumé « qui n’est pas une obligation religieuse,
contrairement à ce que les intégristes veulent faire croire », que la militante continue son combat aux côtés de
ces « courageuses » iraniennes (portant le voile ou pas) de la
Résistance, en scandant ce même slogan qu’au premier jour du soulèvement pour
la liberté, la justice et la démocratie : « Avec ou sans hijab, en avant la révolution pour en finir avec ce régime.” Son seul espoir de regagner sa terre natale…
https://www.oisehebdo.fr/2024/04/23/beauvais-combat-autrice-iranienne-renversement-politique-iran/
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